Les contes populaires aident à grandir.
Loup, ogre, sorcière, enfants abandonnés ...
Ça fait peur. C'est triste.
Pourquoi raconter ses ''horreurs'' aux petits ?
Pour les effrayer ? Pour le plaisir de devoir les rassurer ?
Est-ce vraiment différent des jeux de cache-cache ou de loup qui font frémir les plus petits, qui pourtant ne cessent d'en redemander ?
Et vous les adultes, pourquoi regardez-vous des films qui procurent chez vous un mélange de jubilation et de terreur ?
Pas n'importe quelle histoire !
Avant tout, je tiens à préciser que les histoires dont je parle ici sont les contes populaires tels que "le Petit Chaperon Rouge", "les Trois Petits Cochons", "Le Petit Poucet", ou encore "la Belle au Bois Dormant" (et non pas "cars" ou "Turbo").
Ces contes sont en effet particuliers
- de par leur contenu : enjeux relationnels, quête existentielle... - mais aussi de par leur forme : ces contes qui sont très anciens ont tout d'abord été transmis à l'oral par un conteur.
Tout au long des années, leur trame a survécu.
Encore aujourd'hui leur structure narrative est la même.
Et les formulettes qui les représentent ont été conservées : "Il était une fois", Tire la chevillette et la bobinette cherra", "Sésame ouvre-toi"...
Ce sont ces particularités du conte populaire qui lui offrent le pouvoir de réveiller les archaïsmes inconscients et les grandes questions existentielles.
Les contes populaires pour dépasser les épreuves de la vie
Comme vous le savez, la vie est jalonnée d'épreuves à dépasser (séparation, perte, appropriation des règles sociales...), de pulsions à contrôler (de destruction, de dévoration...) et de questions existentielles à méditer (l'inévitable du temps qui passe, la mort, passer d'enfant à parent ...).
Personne n'y échappe. La naissance est la première épreuve, et toutes se succèdent, qu'on soit prêt à les penser ou pas.
La particularité de tout ce processus est qu'il est psychique, et non pas concret. Il s'agit de dompter les angoisses qui émergent (parfois sans qu'on en est conscience), ce travail ne se limitant pas à l'intellectualisation.
Ainsi sans le mentaliser complètement, nous nous confrontons parfois à nos angoisses internes.
Nous nous entraînons à les maîtriser par des exercices.
C'est exactement ce qui se passe lorsque votre enfant vous demande tous les soirs la même histoire.
Et interdit d'en changer un seul mot ! Puisque l'exercice consiste à gérer l'émotion qui va venir ("je sais qu'après ce mot, je vais me sentir triste ou effrayé, je peux donc m'y préparer pour être moins submergé").
Le conte permet de travailler les angoisses tout en les gardant à distance
Vous savez donc maintenant que les angoisses réveillées par le conte pré-existent.
Le conte n'est pas à l'origine des inquiétudes que pourrait montrer votre enfant, il n'en est que le révélateur.
Ainsi si votre enfant est d'accord pour lire à nouveau ce conte qui le remue tant, ne vous y opposez pas : il est en train de mettre à l'épreuve ses angoisses internes.
Il les projette sur les éléments du conte, car c'est plus facile de dépasser ses peurs lorsque "c'est du faux".
Luttez contre votre envie de surprotéger votre enfant
Lorsque votre tout-petit a fait son premier pas, il est tombé et a pleuré.
Vous avez peut-être senti votre cœur de parent se déchirer, et l'envie de lui éviter toute autre chute.
Mais heureusement vous lui avez accordé le droit de s'exercer à la marche.
Là c'est pareil.
Vous êtes peut-être tenté de modifier les passages des contes populaires que vous jugez trop durs pour votre petit (la mère de Bambi abattue, les deux frères cochons dévorés par le loup...).
Mais n'est-ce pas dommage de ne pas lui proposer ces moyens de travailler sa peur de la séparation et sa pulsion de dévoration ?
C'est sûr qu'il se débrouillera sans cela, mais : peut-être continuera-t-il à se montrer anxieux lorsque vous le déposez chez la nounou. Peut-être continuera-t-il à mordre ses ''copains'' à la crèche. Peut-être trouvera-t-il un livre ou un jouet accessible pour jouer ces angoisses ''pour de faux''.
Pour finir : une petite recommandation cependant
Ne pas surprotéger ses enfants vis-à-vis des contes populaires ne signifie pas de les y exposer n'importe quand, n'importe comment.
- Respectez les âges recommandés.
- Respectez la sensibilité de votre enfant.
- Interdit d'obliger un enfant à rester assis le nez sur des images qui lui font peur, il peut bouger pendant l'histoire, voire sortir.
- Un dessin animé n'est pas l'équivalent d'un conte oral. Il faut prendre en compte l'ambiance qui alourdit ou allège le texte : la musique, les couleurs principales, les voix, les techniques de dessin...
- Il en va de même pour le livre que vous choisirez (illustrations) et l'ambiance dans laquelle vous le lirez, les intonations, etc.